181. Les Morts de la Grande Guerre de Guéret
1 octobre 2015 Luc Fessemaz
Cet article se propose de dresser le portrait statistique des 296 Morts de la Grande Guerre de Guéret à partir de la liste constituée par le croisement entre la liste des 275 Morts inscrits sur le monument aux morts et la liste des 207 Morts du Livre d'Or. Il s'agit essentiellement d'une analyse descriptive conduite à partir de onze indicateurs présents sur les fiches individuelles des Morts pour la France que l'on trouve sur le site Mémoire des hommes du ministère de la défense ou sur les registres matricules que l'on trouve sur le site des Archives départementales de la Creuse.
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[1] Le classement des Morts de la Grande Guerre de Guéret selon le nom
Un siècle après la Grande Guerre, se souvenir de ceux qui sont décédés, c'est d'abord leur donner un nom. Les noms sont gravés à jamais sur le monument aux morts de la commune, mais tous les soldats morts de la Première Guerre mondiale n'y figurent pas nécessairement. La liste des 296 Morts de la Grande Guerre de Guéret a été composée en croisant la liste des 275 Morts de la Grande Guerre qui figure sur le monument aux morts inauguré le 1er juillet 1923 et situé dans le jardin public du Musée de la Sénatorerie, et la liste des 207 Morts pour la France du Livre d'or de Guéret élaboré en 1929-1930 par le ministère des Pensions et disponible sur le site des Archives nationales.
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Dans la liste des 296 Morts de Guéret on compte 253 noms différents. 218 noms figurent une seule fois et 35 noms figurent de deux à quatre fois (graphique circulaire 1). Ces statistiques traduisent la grande diversité du stock des noms en France par rapport à de nombreux autres pays. Cette diversité est cependant moindre que celle que l'on peut observer aujourd'hui, car la liste porte sur des générations nées à la fin du XIXe siècle, époque où l'effet des migrations de population au niveau national ou international reste encore faible dans un département comme la Creuse. Les trois noms les plus fréquents apparaissent quatre fois dans la liste, il s'agit de Dubreuil, Dumont et Tourteau. On peut supposer qu'il s'agit le plus souvent de membres d'une même famille (des frères ou des cousins), mais il faudrait mener une enquête généalogique auprès de l'état civil pour le confirmer. Martin qui est le nom le plus fréquent en France figure trois fois dans la liste, il en est de même pour Sudron qui est un nom typiquement creusois. Parmi les 30 noms qui figurent deux fois dans la liste, on note d'autres noms typiquement creusois comme Lecante, Suchaud et Vernaudon. Par contre, on remarque que Moreau qui est le nom le plus fréquent en Creuse sur la période 1891-1990, est absent de la liste (1).
(1) Article Patronymes et toponymes courants en Limousin : un déterminisme géographique. Auteur : Joselito Mancuso – Insee Limousin, novembre 2007.
Graphique 1
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[2] Le classement des Morts de la Grande Guerre de Guéret selon les prénoms
Le prénom est le second marqueur d'identité pour une personne. Sur les monuments aux morts ne figurent parfois que l'initiale du prénom d'usage, par contre sur les fiches individuelles des Morts pour la France ou sur les registres matricules, on trouve l'ensemble des prénoms dans l'ordre de l'état civil. 114 Morts de la Grande Guerre de Guéret (39%) s'inscrivent encore dans ce que la sociologie des prénoms (2) appelle le modèle classique caractérisé par un prénom unique transmis par parrainage (3). Mais on compte 182 Morts (61%) avec deux prénoms ou plus.
Les premiers prénoms
Pour les premiers prénoms, les 296 Morts de Guéret mobilisent un stock de 69 prénoms. Dans ce stock de premiers prénoms, la concentration est forte car les dix prénoms les plus fréquents rassemblent 50% des Morts (3). Trois prénoms se détachent : Jean est nettement en première position (33 Morts ; 11,1%), Henri vient en seconde position (24 Morts ; 8,1%) et Louis en troisième position (20 Morts, 6,8%). Jean et Pierre (4e position), correspondent aux prénoms chrétiens traditionnels qui se sont imposés en France à partir du XIIIe siècle. Les premières places occupées par Henri et Louis (premier prénom en France sur la période 1890-1899), s'expliquent plus par un phénomène de mode qui caractérise les générations nées à la fin du XIXe siècle (4).
Dans le classement des dix premiers prénoms de la liste, on note la présence de François (5e position, prénom doté de saints patrons importants) et l'absence de Joseph (troisième prénom en France sur la période 1890-1899) qui a progressé à partir du XVIe siècle. On observe enfin la faible présence d'un prénom typiquement limousin comme Léonard (21e position avec 4 Morts) (5).
Notes :
(2) Sociologie des prénoms, Baptiste Coulmont, collection Repères, Éditions La Découverte, octobre 2014.
(3) De Jean à Théo, de Marie à Léa : un siècle de prénoms. Auteur : Joselito Mancuso – Insee Limousin, novembre 2005.
L'article montre que le stock des prénoms a quadruplé en Limousin en un siècle : ” Jusqu'à la fin des années 1940, la palette des prénoms attribués oscillait entre 200 et 300 prénoms pour les femmes, et entre 150 et 200 prénoms pour les hommes. (...) Au début du siècle dernier, les dix prénoms les plus fréquemment attribués représentent plus de la moitié des naissances. Aujourd'hui, seulement un nouveau-né sur cinq porte l'un des dix prénoms les plus couramment donnés aux enfants.”
(4) La Cote des prénoms (ouvrage annuel), Philippe Besnard, Guy Desplanques, Éditions Balland.
(5) Léonard, Marie, Jean et les autres : les prénoms en Limousin depuis un millénaire [par] Louis Perouas, Bernadette Barrière, Jean Boutier, Jean-Claude Peyronnet, Jean Tricard et le groupe Rencontre des historiens du Limousin. Éditions du Centre national de la recherche scientifique, 1984.
Graphique 2.1
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Les seconds prénoms
182 Morts de la Grande Guerre de Guéret (61%) ont un second prénom et mobilisent un stock de 68 prénoms. Dans ce stock de seconds prénoms, la concentration est un peu moins forte car les dix prénoms les plus fréquents rassemblent 45 % des Morts. Par rapport au classement des premiers prénoms, Jean reste en première position à égalité avec François et Auguste. On retrouve également Louis (4e position), Henri et Pierre (5e position) et Émile (7e position). On constate l'entrée dans ce classement de Baptiste (prénom chrétien), Marie (prénom féminin protecteur) et Eugène (prénom à la mode à la fin du XIXe siècle)
Graphique 2.2
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Les troisièmes prénoms
58 Morts de la Grande Guerre de Guéret (20%) ont un troisième prénom et mobilisent un stock de 44 prénoms. La dispersion augmente encore, car les dix troisièmes prénoms rassemblent moins de 40% du total. Le prénom d'Auguste occupe la première position avec Gabriel et Léon. Le troisième prénom élargit le choix à d'autres prénoms traditionnels comme Antoine, Jacques, Joseph et des prénoms plus récents comme Armand et Lucien.
Graphique 2.3
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Les quatrièmes prénoms
Plus marginal statistiquement, on observe que 10 Morts de la Grande Guerre de Guéret ont un quatrième prénom (3%). On remarque la présence de Sylvain et Silvain, prénom lié à un saint berrichon et répandu dans le département voisin de l'Indre (6). Parmi les prénoms rares de ce classement, on peut retenir Julien et Raoul, et surtout Delphin.
(6) Léonard, Marie, Jean et les autres : les prénoms en Limousin depuis un millénaire [par] Louis Perouas, Bernadette Barrière, Jean Boutier, Jean-Claude Peyronnet, Jean Tricard et le groupe Rencontre des historiens du Limousin. Éditions du Centre national de la recherche scientifique, 1984, page 112.
Graphique 2.4
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[3] Le classement des Morts de la Grande Guerre de Guéret selon la date de naissance
La répartition des Morts de la Grande Guerre de Guéret selon les générations est liée à l'organisation de l'armée française et à sa mobilisation à partir du 2 août 1914. Les hommes de 21 à 23 ans de l'armée d'active et les hommes de 24 à 34 ans de la réserve de l'armée d'active sont mobilisés en premier et envoyés au front. Les hommes de 35 à 41 ans de l'armée territoriale et ceux de 42 à 49 ans de la réserve de l'armée territoriale sont mobilisés plus tardivement et à l'arrière du front. Cette structure par âge de l'armée française explique que les décès se concentrent sur les générations nées entre 1881 (classe 1901 âgée de 33 ans à la mobilisation générale en août 1914) et 1896 (classe 1916 mobilisée en avril 1915). Les trois générations les plus frappées sont celles de 1889 avec 23 Morts, 1890 et 1893 avec 21 Morts. Dans les générations les plus âgées, on compte un à trois Morts pour ceux qui sont nés entre 1863 et 1874. Dans les générations les plus jeunes mobilisées au cours de la guerre, on recense 8 Morts nés en 1897 et 5 Morts nés en 1898, mais il n'y a pas de Morts pour les générations nées en 1899 et 1900.
Graphique 3
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[4] Le classement des Morts de la Grande Guerre de Guéret selon le lieu de naissance
Dans la liste des 296 Morts de la Grande Guerre de Guéret, 122 sont nés à Guéret (41%) et 97 sont nés dans 49 autres communes du département de la Creuse (33%). Le quart restant rassemble 75 Morts nés dans 28 autres départements. En dehors de Paris qui est un lieu traditionnel d'émigration pour les Creusois, on trouve le plus souvent des départements proches géographiquement comme la Haute-Vienne, l'Allier, la Dordogne, la Corrèze, la Charente, l'Indre et la Vienne. On note une seule naissance dans un pays étranger (Bulgarie) et un cas où le lieu de naissance est inconnu.
Graphique 4.1
On compte 219 Morts de la Grande Guerre de Guéret répartis dans 50 des 260 communes de Creuse (7). 122 Morts de la Grande Guerre de Guéret sont originaires de la capitale du département qui compte 8 281 habitants en 1911. Les 97 Morts du reste de la Creuse sont le plus souvent originaires de communes qui se situent à la périphérie de Guéret comme Saint-Sulpice-le-Guéretois (11 Morts), Saint-Fiel (7 Morts), Saint-Vaury (7 Morts) ; où dans des communes qui ont une taille démographique relativement importante comme Aubusson (2 Morts) ou La Souterraine (2 Morts). On trouve cependant des Morts de Guéret dans des communes de très petite taille comme Savennes (2 Morts) et Saint-Christophe (2 Morts).
(7) Consultez la feuille 4 du tableau statistique sur les lieux de naissance, en ligne sur le site La Grande Guerre et le Limousin. Elle permet de comparer la population des communes de Creuse au recensement de 1911 avec le nombre de Morts de la Grande Guerre de Guéret.
Carte 4.2
En dehors des 219 Morts de la Grande Guerre de Guéret nés en Creuse, on compte 75 Morts dans 28 autres départements. Paris et la Haute-Vienne arrivent en seconde position avec respectivement 11 Morts chacun. Il est impossible, dans le cadre de cet article, d'expliquer d'une façon détaillée la répartition géographique des départements de naissance car il faudrait pour cela connaître l'histoire de chaque famille conduisant, à un moment donné, à une migration vers Guéret.
Carte 4.3
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[5] Le classement des Morts de la Grande Guerre de Guéret selon la date de décès
Le nombre de Morts par année
Pour les soldats de Guéret, l'année 1914 est la plus meurtrière avec 72 Morts (24%). Viennent ensuite les années 1916 et 1918 qui enregistrent des données assez similaires avec respectivement 63 Morts (21%) et 61 Morts (21%). L'année 1915, qui enchaîne pourtant plusieurs offensives meurtrières, vient seulement en quatrième position avec 53 Morts (18%). L'année 1917 est la moins meurtrière avec 40 Morts (14%), si on met à part l'année 1919 qui fait suite à l'Armistice du 11 novembre 1918 et qui ne compte que 6 Morts (2%).
Graphique 5.1
Le nombre de Morts par mois
Si on examine le nombre de Morts par mois, on observe que les deux premiers mois de la Grande Guerre sont très meurtriers avec 28 Morts en août 1914 et 21 Morts en septembre 1914. Cette période correspond à la guerre de mouvement qui a vu le choc brutal des armées française et allemande se dérouler en plusieurs phases : échecs des offensives françaises et grande retraite, arrêt de l'offensive allemande avec la bataille de la Marne et poursuite. Après la phase de la course à la mer, les armées s'installent dans la guerre des tranchées. Les violents combats en Lorraine (Les Éparges et le bois de Mort-Mare) se traduisent par 10 Morts en avril 1915. L'année 1916 connaît un sommet relatif en juin 1916 avec 14 Morts, en rapport avec la bataille de Verdun. Le nombre de Morts s'élève de nouveau en avril 1917 avec l'offensive du Chemin-des-Dames (11 Morts , et en octobre 1918 (13 Morts), au moment de la contre-offensive des Alliés qui allait mener à la Victoire.
Graphique 5.2
Août 1914 : Le mois le plus meurtrier
Si on se focalise sur le mois le plus meurtrier pour les soldats de Guéret, on observe un profil journalier très particulier.
Pendant les deux premières semaines qui suivent la mobilisation du 2 août 1914, il n'y a pas de Morts car c'est la phase d'acheminement des troupes vers le front. Les deux premiers Morts de la Grande Guerre de Guéret sont tombés en Moselle, alors territoire allemand, le 20 août 1914 (bataille de Dieuze). Le 22 août 1914, la bataille des frontières se poursuit et se traduit par 2 Morts dans les Ardennes belges et 1 Mort dans les Vosges. Le choc le plus violent se produit le 28 août 1914 lors de la Grande Retraite des armées françaises : on compte 19 Morts liés à l'engagement des soldats de Guéret dans les combats de Raucourt (Ardennes) avec le 78e régiment d'infanterie et dans les combats de Rocquigny (Pas-de-Calais) avec le 263e régiment d'infanterie.
Graphique 5.3
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[6] Le classement des Morts de la Grande Guerre de Guéret selon l'âge au décès
L'âge au décès est en rapport avec la date de naissance, dont on a vu qu'elle déterminait l'appartenance aux différentes structures de l'armée française (armée d'active, armée de réserve, armée territoriale). On retrouve donc un profil de graphique qui est comparable à celui fonction de la date de naissance. L'écart entre les deux provient de la date de décès : pour une même année de naissance, l'âge au décès peut varier selon que le soldat est mort au début de la guerre ou 4 ans plus tard, à la fin de la guerre. L'âge au décès le plus fréquent des Morts de la Grande Guerre de Guéret est de 21 ans avec 24 Morts. Les âges de 20 à 28 ans rassemblent 169 Morts (57%) ; et les âges de 29 à 38 ans comptent 99 Morts (33%). Parmi les plus jeunes, il y a 9 Morts âgés de 18 et 19 ans (3%) ; et parmi les plus anciens, 19 Morts âgés de 39 à 52 ans (6%). L'âge moyen au décès se situe à 28,6 ans.
Graphique 6
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[7] Le classement des Morts de la Grande Guerre de Guéret selon le lieu de décès
On compte 274 Morts en France, répartis dans 25 départements. Les principaux départements de décès se trouvent sur la ligne de front (voir le graphique 7.1 et la carte de France 7.2) : on trouve 55 Morts dans la Meuse (17%), 41 Morts dans la Meuse (15%), 37 Morts dans la Somme (14%), 36 Morts dans l'Aisne (13%) , 23 Morts dans le Pas-de-Calais (8%), 14 Morts dans les Ardennes (5%), 14 Morts dans l'Oise (5%), 12 Morts en Meurthe-et-Moselle (4%) et 4 Morts dans le Nord (1%). Ces neuf départements rassemblent plus des 4/5 des Morts en France.
La Creuse, en tant que lieu d'origine des soldats, est le département de l'arrière qui compte le plus de Morts (26 Morts dans des hôpitaux ou à domicile, essentiellement de maladie). On compte ensuite 4 départements avec 2 Morts et 11 départements avec 1 Mort. Il s'agit pour l'essentiel de décès dans des hôpitaux liés à des maladies ou des suites de blessures.
Graphique 7.1
Carte 7.2
Les Morts dans les pays étrangers
L'immense majorité des décès de la Grande Guerre se situe en France (93% des Morts) car le pays doit faire face pendant plus de quatre ans à l'occupation d'une partie de son territoire par l'Allemagne. On compte cependant 22 Morts dans sept pays étrangers.
Les 9 Morts de la Grande Guerre de Guéret décédés en Belgique l'ont été à des moments et dans des lieux différents : dans les Ardennes belges lors de la bataille des frontières en août 1914, et sur le front de l'Yser d'octobre 1914 à octobre 1918.
Les 4 Morts en Allemagne sont décédés de maladie en captivité, entre mars 1917 et décembre 1918.
Sur le front italien, on compte 4 Morts entre juin et novembre 1918 (1 Mort de blessures, 2 Morts de maladie, 1 Mort dans une usine pour une cause inconnue).
Sur le front d'Orient, on compte 2 Morts en Grèce et 1 Mort en Bulgarie, tous décédés de maladie.
Il y a aussi 1 Mort dans le port de Malte lors de l'explosion du cargo mixte Saint-Laurent, le 5 février 1917 et 1 Mort au Maroc, tué par balle le 1er avril 1919, lors d'un accrochage avec des rebelles marocains.
Graphique 7.3
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[8] Le classement des Morts de la Grande Guerre de Guéret selon le lieu de résidence
Le lieu de résidence au décès détermine la commune dans laquelle se fait la transcription de l'acte de décès auprès de l'état civil, quelques jours, quelques semaines ou quelques mois après la date de décès. Il est en général indiqué dans la partie basse de la fiche individuelle de Mort pour la France, mais son renseignement n'est pas systématique.
Fort logiquement, les trois quarts (74%) des Morts de la Grande Guerre de Guéret ont Guéret comme lieu de résidence au décès. Dans cet ensemble de 220 Morts, on peut distinguer deux cas de figure : 96 Morts (44% des résidents de Guéret) sont nés à Guéret et y ont certainement résidé jusqu'au début de la guerre ; 124 Morts sont nés ailleurs (56 % des résidents de Guéret) et sont venus à un moment donné résider à Tulle (78 sont nés dans des communes de Creuse et 46 sont nés dans des communes du reste de la France).
Dans le quart restant, 22 Morts de la Grande Guerre de Guéret (7%) ont un lieu de résidence dans d'autres communes de Creuse, 19 Morts (6%) ont un lieu de résidence dans l'ancien département de la Seine (principalement à Paris). On trouve ensuite des lieux de résidence dans des départements géographiquement proches de la Creuse comme la Haute-Vienne, l'Allier, la Charente, la Corrèze ou l'Indre. Le reste des Morts se disperse dans dix autres départements (le Nord et 9 autres départements) dont les lieux de résidence ne peuvent s'expliquer que par des histoires familiales spécifiques. On note enfin la présence de 9 Morts dont le lieu de résidence n'est pas renseigné.
Graphique 8
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[9] Le classement des Morts de la Grande Guerre de Guéret selon le type de régiment
Le régiment au décès est une information importante pour dresser le parcours individuel d'un soldat car cela permet ensuite de consulter sur le site de Mémoire des hommes les Journaux des Marches et Opérations et l'Historique de ce régiment pendant la Grande Guerre. Il n'est pas envisagé dans le cadre de cet article de passer en revue tous les régiments associés aux 296 Morts de la Grande Guerre de Guéret. Pour donner une vision synthétique, on a regroupé les données des régiments appartenant à un même type d'un point de vue militaire.
Les statistiques illustrent le fait que les Morts se concentrent très fortement dans l'infanterie : toutes catégories rassemblées (chasseurs, coloniaux, actifs, réservistes, territoriaux) on est presque à la proportion de 9/10 (86%). Dans cet ensemble, les 141 Morts de l'infanterie d'active sont majoritaires (48%), ils se répartissent dans 66 régiments (Graphique 9.2 : le 78e RI de Guéret et Limoges est le plus frappé avec 36 Morts). En seconde position, on trouve l'infanterie de réserve avec 72 Morts (24%) répartis dans 27 régiments (Graphique 9.2 : parmi les trois régiments les plus frappés, on trouve deux régiments de réserve, les 278e RI et 263e RI de Limoges qui comptent 20 et 11 Morts). En troisième position on trouve les régiments coloniaux au sens large (infanterie coloniale, tirailleurs, zouaves) avec 20 Morts (7%), ils devancent les bataillons de chasseurs qui comptent 14 Morts (5%) et les soldats plus âgés de l'infanterie territoriale qui comptent 8 Morts (3%).
Dans les autres catégories on relève 20 Morts dispersés dans 19 régiments d'artillerie (7%), 6 Morts pour la cavalerie, 6 Morts dans les sections d'infirmiers, 4 Morts parmi les sapeurs du génie, 1 Mort dans les escadrons du train des équipages militaires (transport et logistique), 1 Mort dans l'aviation (nouvelle arme rattachée à l'armée de terre jusqu'en 1934), 1 Mort dans l'administration (section de commis et ouvriers d'administration) et 1 Mort dans la gendarmerie.
Graphique 9.1
Les régiments ayant le plus de Morts
Les 18 régiments qui comptent 3 Morts et plus concentrent 44% du total des pertes de la Grande Guerre de Guéret. On recense 8 régiments d'active, 6 régiments de réserve, 3 régiments de coloniaux et de zouaves et 1 régiment de territoriaux. La logique d'affectation des recrues fait que l'on y trouve d'abord des régiments dont le casernement se trouve dans la 12e région militaire (Charente, Corrèze, Creuse, Dordogne, Haute-Vienne). Il y a également deux régiments de la 13e région militaire voisine (Montluçon et Clermont-Ferrand) et quatre régiments situés à proximité du front (Valenciennes, Reims et Verdun, Bar-le-Duc et Lérouville). Les deux régiments de zouaves sont situés en Afrique du Nord (Oran, Tunis) et le 7e RIC à Bordeaux.
Graphique 9.2
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[10] Le classement des Morts de la Grande Guerre de Guéret selon le grade
Toute la hiérarchie militaire est touchée par l'ampleur des pertes. Dans le cas des Morts de la Grande Guerre de Guéret, on peut retenir les ordres de grandeur suivants : un officier mort pour trois sous-officiers et petits gradés et six hommes de troupe.
Dans le détail, les officiers comptent 27 Morts (9%), les sous-officiers 42 Morts (14%) et les petits gradés 38 Morts (brigadiers et caporaux, 13%).
Les Morts des hommes de troupe rassemblent 177 soldats d'infanterie (60%), 6 canonniers et 1 maître pointeur, 3 sapeurs, 1 infirmier, 1 gendarme.
Parmi les grades les plus élevés, on trouve deux commandants : un chef de bataillon d'infanterie et un chef d'escadron d'artillerie.
Graphique 10
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[11] Le classement des Morts de la Grande Guerre de Guéret selon le genre de mort
Le genre de mort est une indication essentielle dans les fiches individuelles car il détermine l'attribution de la mention Mort pour la France fixée par la loi du 2 juillet 1915. Cette mention est attribuée à tout militaire tué à l'ennemi ou mort de blessures de guerre, décédé de maladie ou lors d'un accident survenu en service. La Première Guerre mondiale est synonyme de “mort industrielle de masse” (7), elle se traduit par plus de 1,3 million de militaires décédés avec la mention Mort pour la France. Dans la liste des 296 Morts de la Grande Guerre de Guéret, on trouve 279 Morts pour la France et 17 « Non Morts pour la France »
La première origine des décès est la mort trouvée directement lors des combats : le genre « tué à l'ennemi » rassemble 146 Morts (49%), les fiches précisant parfois les armes qui ont tué (tué par balle ou par éclat d'obus). La seconde origine est la mort de “blessures de guerre” ou des « suites de blessures », elle rassemble 62 Morts (21%). Dans le premier cas le décès se produit à proximité du front dans des ambulances ou hôpitaux d'évacuation, dans le second cas le décès se produit plus tardivement dans les hôpitaux de l'arrière. La troisième origine est la “maladie en service” avec 31 Morts (11%), ce genre de mort rassemble plusieurs types de maladies largement liées aux mauvaises conditions de vie dans les tranchées : fièvre typhoïde, typhus, pneumonie, tuberculose, grippe... La quatrième origine concerne les militaires « disparus » au combat avec 16 Morts (5%), elle résulte de la violence de la guerre qui fait disparaitre les corps des victimes (7). Administrativement, c'est souvent une position provisoire entre prisonnier et tué, et qui a pu se prolonger jusqu'à un jugement déclaratif de décès prononcé par un Tribunal civil après la fin de la guerre. On compte aussi 10 « Morts pour la France » (3%) pour lesquels le genre de mort n'est pas renseigné, en réalité il s'agit souvent de « disparus » que l'on pourrait regrouper avec l'ensemble précédant. La cinquième origine concerne les 8 décédés en captivité qui désigne des prisonniers morts de blessures ou de maladie en Allemagne ou sur le territoire français occupé. Le cas particulier des 17 « Non Morts pour la France » comporte l'ensemble des 14 Morts pour maladie aggravée ou non imputable au service, 2 Morts par accident et 1 Mort dont la cause de décès est inconnue. Il y a enfin quelques Morts liés à des circonstances particulières : intoxication par gaz, combat aérien, accident en service.
(7) André Bach, « La mort en 1914-1918 », Revue historique des armées, 259 | 2010, 23-32.
Graphique 11
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► Pour vérifier vos connaissances sur les onze indicateurs, complétez les 20 questions du Quiz sur le Portrait statistique des Morts de la Grande Guerre de Guéret.
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